par  Louis ROUSSEL

Comment un congolais sans ressources passe de l’enfer au paradis en devant le premier belge Champion NBA ? En avril 1999, Didier Mbenga débarque en Belgique. Moins d’une semaine auparavant, il est parvenu à s’échapper de la cellule dans laquelle il attendait son exécution. En raison de sa grande taille (2.08m), les congolais pensaient qu’il était un Tutsi (partie de la population exclue) rwandais. Suite à divers conflits se déroulant au Rwanda, les Tutsi pour éviter le génocide, s’exilent au Zaïre. Les Hutus congolais ont voulu chasser de leur terre, les Tutsi s’étant réfugiés chez eux. Certains sont tués, d’autres sont faits prisonnier ou expulsés. Didier a été pris à tort pour un Tutsi et donc emprisonné. De plus, son frère opposant au régime congolais est une raison supplémentaire pour le jeter en prison. Le voilà dès lors en Belgique. Après un court passage chez un pasteur protestant à Anvers, il séjourne dans un centre d’accueil à Kappelen. Son accompagnatrice personnelle, Kaat Wouters, a livré une anecdote prouvant que Mbenga était « quelqu’un de spécial ». « Quand il est rentré ici, à la fin du mois de juin 1999, il mesurait plus de deux mètres et était trop grand pour nos chambres » raconte Mme Wouters en souriant. Malheureusement, sa demande d’asile en Belgique fut refusée et quelques jours plus tard, il recevait officiellement la nouvelle qu’il ne pouvait plus rester en Belgique. Après une lettre de motivation pour faire appel de cette décision, il a finalement été reconnu comme réfugié politique. Il fut affecté en suite à un CPAS dans une des communes d’Anvers.   C’est par le plus grand des hasards que sa carrière de basketteur commença. Alors que Didier était à l’arrêt de bus, Willy van Damme, ancien joueur de basket à haut niveau, le remarqua. Willy s’approcha alors du « géant » et lui demanda s’il jouait au basket. Pour s’en tirer rapidement, Didier menti et répondit que oui, il jouait à la balle orange. C’est là que sa carrière débuta. Didier fut présenté à Steveniers, un des plus grands anciens joueurs de basket belge et le prit sous son aile. Mr Steveniers voyait en Mbenga un diamant brut qu’il fallait exploiter à tout prix. Didier Mbenga possédait déjà une capacité à courir, une mobilité et une puissance de saut phénoménale. Il avait atteint la taille de 2.13m et possédait une grande explosivité pour un gars aussi grand. Son nouveau coach, Steveniers, a du tout lui apprendre, du simple saut aux dribbles avec une balle. Didier ne savait rien et n’avait vraiment pas l’habitude de faire du sport. Il se plaignait beaucoup au début. Mais l’entrainement était toujours plus intensif que la veille, Didier devenait un monstre physique et commençait à appréhender le feeling du jeu. Steveniers le fit jouer dans l’équipe qu’il coachait alors à l’époque. Il vécut des débuts compliqués mais « sa puissance de saut était un spectacle à voir ». Willy Steveniers qui n’était pas inconnu des journalistes, introduisis sa pépite aux médias belges. Didier devint rapidement une vedette nationale. Pendant un moment, sa nationalité lui empêcha de signer un contrat professionnel. Heureusement, la grande campagne de régularisation est arrivée en 2000 et il put être naturalisé assez facilement. Le voilà enfin Belge. Il signa d’abords un contrat avec l’équipe de Anvers qui évoluait alors en deuxième division nationale. Il fut ensuite repéré par l’entraineur et la direction de Charleroi qui sont tombés sous le charme de Didier. Il a enfin pu signer son premier contrat professionnel. Du centre d’accueil, où il n’avait rien, Didier avait en quelque sort atterri au paradis. Il a joué en tout trois saisons sur le sol belge au niveau professionnel. Deux avec les Spirou Charleroi et une avec Louvain.

Il a ensuite quitté le basketball belge en 2004 pour rejoindre les Etats-Unis. Il attira l’attention des Dallas Mavericks où il signa un contrat en or. Et dès lors, il effectue une première action magnifique mais hors des terrains. Effectivement, il crée une association pour les réfugiés du Congo en Belgique. Pour revenir au basket, en tant que remplaçant, il ne passe que quelques minutes par match sur le terrain. Il progresse lentement mais participe dès 2006 à la finale perdue par Dallas (4-2) contre Miami. Il se blesse sérieusement au genou en début 2007 et on se demanda alors combien de temps il tiendra le coup de cette manière au sommet. Il signa quand-même un contrat aves les Warriors le 17 novembre 2007 pour finalement débarquer chez les Lakers le 21 janvier 2008. Ce 21 janvier, il avait signé un premier contrat de dix jours pour Los Angeles Lakers, puis un second le 1er février. Les Lakers ne pouvaient alors le conserver qu'à condition de le signer jusqu'au terme de la saison. Ce qu'ils ont fait. Didier Mbenga a joué jusqu'ici 103 rencontres de NBA (en débutant le match à deux reprises) pour afficher une ligne de stats de 1,4 points, 1,2 rebonds et 0,5 bloc-shots par match en 5,4 min de moyenne. Il est également dans le groupe qui perd la finale 2008 (4-2) face à Boston. Il pesa plus par sa joie de vivre et son caractère enthousiaste que sur ses performances sur le terrain. Kobe était fan de Mbenga, il le surnomma même Congo Cash. Didier prolongea pour une année son contrat avec les Lakers. Cette année-là, il figure dans l'effectif des douze prestigieux Lakers retenus pour la série finale. Les Lakers remportent deux titres en back to back. Il remporta donc deux bagues Champion NBA en 2009 et 2010 avec les Lakers de Los Angeles et devient le premier et seul belge à être champion NBA.

Il signa ensuite un contrat presque anecdotique avec les Hornets de La Nouvelle-Orléans. Didier Mbenga termina sa carrière aux côtés d’un ancien très grand joueur NBA, Tracy McGrady en Chine, aux Qingdao DoubleStar Eagles où il y joua deux saisons.   Voilà l’histoire fabuleuse de ce joueur ayant frôlé l’exécution pour finalement soulever le très convoité Trophée Larry O'Brien !  

Palmarès  

  • Champion de Belgique avec les Spirou de Charleroi en 2004
  • Champion NBA en 2009 et 2010 avec les Lakers de Los Angeles
  • 1er joueur belge NBA en 2004
  • 1er joueur belge en finale NBA en 2006
  • 1er joueur belge champion NBA en 2009
  • Sélection en équipe nationale belge (Belgian Lions)

  À titre personnel, en aout 2004, avant de s’envoler vers les States, il est venu encourager les jeunes d’un centre d’accueil près de Charleroi. A peine âgé d’un 1 mois, il m’a pris dans sa main. J’ai eu l’occasion de le croiser lorsqu’il revenait en sélection nationale et j’aimerai 17 ans après le revoir mais cette fois, j’ai un doute sur le fait qu’il puisse me tenir encore dans sa main.