par Jean VEILLEROT

Larry Bird est très taquin, surtout sur un parquet. Démoraliser et humilier ses adversaires par une phrase piquante ou un beau geste : un plaisir pour lui. Florilège d’anecdotes racontant les meilleurs moments de trashtalking du blondinet.
Larry Legend excelle dans tous les domaines du basket-ball ou presque. Le trashtalking n'y fait pas exception. Sous sa belle moustache dorée se cache une langue de vipère mettant à mal le mental de ses victimes. Elle peut attaquer les oreilles par une fourbe provocation et se défendre grâce à une répartie cinglante. Mais le trashtalking ce n'est pas que des mots, c'est aussi des actions. Nos palabres n'ont aucun impact si on n'assure pas sur le terrain. Bird a bien compris ce principe et n'envoie jamais de paroles en l'air. Quand Larry ouvre la bouche ses opposants peuvent s'attendre à passer un sale quart d'heure. Et il tient ses promesses, quand le Celtic annonce d'où il va tirer lors de la prochaine action à ses adversaires Larry ne ment pas. Voilà un petit avant-goût de l'insolence du garçon, plutôt culotté non ?
La main gauche gifle Portland
En 1986, Boston est dans une année légendaire avec une équipe composée d'un nombre incalculable de joueurs all-time. Au moment d'affronter les Portland Trail Blazers le 14 février, les Celtics sont sur une dynamique de 14 victoires en 15 rencontres. Bilan assez honorable. Le basket étant un sport trop facile pour Larry Bird, ce dernier décide de se compliquer la tâche et annonce aux médias qu'il jouera le match face aux Blazers de la main gauche. Rappelons tout de même que le numéro 33 de Boston est droitier.
Alors, coup de bluff ou fanfaronnade ? Aucun des deux. Bird envoie des lay-up et des tirs main gauche mais reprend son sérieux en fin de match alors qu'un money time serré s'annonce. Les hommes en vert vont même devoir passer par une prolongation pour battre Portland. Le petit caprice de Larry Legend ne l'a pas fait rater son match loin de là. L'ailier termine la rencontre avec 47 points, 14 rebonds, 11 passes décisives et un game winner pour clôturer le spectacle. Tout ça en ayant mis 10 de ses 21 paniers rentrés de sa ''mauvaise'' main. Bird dira à la fin du match qu'il « garde sa main droite pour les Lakers » le prochain adversaire de Boston.
Un concours à l'allure d’échauffement
Le All-Star Game accueille une nouvelle attraction en 1986 : le concours à trois points. Larry Bird sort victorieux de cette première édition et se fait remarquer avant même le début de la suivante. En effet, en entrant dans le vestiaire où ses concurrents se préparent silencieusement, il lâche « Alors, lequel de vous va finir deuxième ? ». Mais comme nous l'avons vu précédemment le natif d'Indiana ne trashtalke jamais en vain et gagne donc le concours.
Et ce n'est pas fini, Bird participe aussi à l'édition de 1988. Pour montrer qu'il n'aura pas de difficulté à gagner, Larry ne daigne même pas retirer sa veste d'échauffement lors du concours. Mais empocher la victoire ne sera pas une tâche aisée pour lui. Pour la finale, le meilleur joueur blanc de l'histoire se frotte à Dale Ellis. Ce dernier commence à tirer et finit avec 15 petits points. Cela semble donc presque dans la poche pour Bird mais il n'est qu'à 13 points en arrivant au dernier rack. Larry Legend rentre deux de ses quatre premiers tirs et égalise donc les 15 points de Ellis. Il prend le dernier ballon, à deux points, shoote et pointe le doigt vers le ciel en se dirigeant vers le centre du parquet. Tout cela avant que la balle n'atteigne le panier. Et bien sûr, ça rentre. Larry Bird remporte donc son troisième concours à trois points de suite, sa veste d'échauffement toujours sur le dos.
Rodman aka invisibleman
Les Celtics affrontent les Detroit Pistons en finale de conférence 1987. Lors d'un match, le rookie Dennis Rodman est chargé par son coach Chuck Daly de défendre sur notre fameux Larry. Un calvaire en perspective pour le jeune Rodman même s'il est déjà un excellent défenseur. Et pas de chance pour lui, Bird prend un malin plaisir à baptiser les rookies comme il se doit. Dennis ne va pas y échapper. Pendant tout le match, le fourbe blond crie à tue tête « Je suis ouvert ! Dépêchez-vous avant qu'ils remarquent que personne ne me défend » alors que le numéro 10 des Pistons est collé à lui. Bird reçoit la balle comme demandé et marque sur la tête de Rodman. Il se permet même de lancer au coach « Qui est au marquage sur moi, Chuck ? Il n'y a personne ? Tu ferais bien de mettre quelqu'un sur moi sinon je vais en mettre 60. »
Aller en prolongation ? Quelle drôle d'idée
Cette anecdote a été racontée par Kevin McHale, mythique coéquipier de Bird, au Dan Patrick Show. Boston joue contre les Suns et mène tranquillement de 15 points. Cependant, les Celtics réalisent un quatrième quart-temps horrible. Larry n'arrive à rien, loupe ses tirs et perd des ballons. Ce trou d'air permet aux Suns de recoller et même de passer devant de 2 points. La dernière possession est pour les hommes en vert et McHale va devoir effectuer la remise en jeu.
Bird vient alors lui dire : « Je ne vais pas suivre le système, je vais juste tirer à trois points ». Le bon Kevin pas très rassuré essaie de le raisonner « Ne fais pas ça, assure les deux points s'il te plaît. Va au panier et essaie d'obtenir la faute. Allons en prolongation puis voyons si on peut gagner ». Bird n'en démord pas et rétorque : « Non, je vais juste planter un trois points ». Avant d'annoncer au banc des Suns : « Ouais je vais juste vous mettre un trois points sur la tête et rentrer chez moi, ce match me fatigue ».
Lors de la remise en jeu, Bird saisit donc la balle, ne prend pas en compte le système et tire à trois points. Pendant que la balle est dans les airs, il se tourne vers le banc de Phoenix et lance : « Je vous l'avais dit ». Cette histoire illustre toute la confiance de Larry Legend. Même après un quart-temps catastrophique, il se permet d'annuler un système. Pour en plus l'annoncer à l'équipe adverse et rentrer un game winner.
Vous avez maintenant la preuve que Larry Bird est un trashtalkeur hors-pair doté d'une confiance inébranlable. Et sa confiance n'a d'égal que son audace car en défiant ses opposants de la sorte, il se défie lui-même. Bird se défie de jouer main gauche, de gagner un concours à trois points en veste d'échauffement, d'ignorer Rodman ou un système. Les conséquences de ces défis peuvent être anecdotiques si l'on joue pour le club de notre petit village. Mais en NBA, un trop-plein d'arrogance peut coûter gros. Trashtalker ainsi demande d'avoir le short bien habité.