par Enzo MORISSEAU

Il y a un peu plus d’un an désormais, Kobe Bryant, sa fille Gigi et sept autres personnes sont décédés dans un tragique accident d’hélicoptère sur les pentes de Calabasas, Californie. Véritable légende vivante de la balle orange, Kobe a tout gagné sur les parquets, absolument tout. L’une des premières lignes de son immense palmarès correspond au titre de 2000, remporté avec ses Los Angeles Lakers de toujours.  

Une saison régulière presque record

  Cela fait douze ans que les Los Angeles Lakers n’ont pas remporté le moindre titre. Douze longues années qui auront vu Michael Jordan devenir le plus grand de tous les temps et douze longues années qui auront vu la franchise de Los Angeles rentrer dans les rangs. Mais à l’aube de l’an 2000, les californiens sont décidés à prouver que les grandes équipes ne meurent jamais. Lors de l’intersaison, les fans de la franchise apprennent l’arrivée de Phil Jackson en tant que coach. Qui mieux que celui qui a déjà remporté six titres pour retrouver les sommets ? Le tacticien américain va pouvoir composer avec une équipe capable de viser haut, très haut. La star de l’équipe est incontestablement Shaquille O’Neal, un véritable monstre physique comme la NBA n’en a jamais vu. Le pivot de deux mètres seize est entouré d’excellents joueurs aux profils bien différents : le jeune Derek Fisher et son mètre quatre-vingt-cinq, Robert Horry l’ailier fort ultra décisif dans les moments forts ou encore le prometteur Kobe Bryant qui entame sa quatrième saison dans la grande ligue. Ce dernier doit passer un cap lors de cette saison aux côtés de Phil Jackson afin de confirmer toutes les attentes placées dans ce nouvel effectif. Sur le parquet, les angelinos atteignent un niveau bien supérieur aux ambitions affichées par les fans et la direction. Les joueurs terrassent chaque franchise qui se place sur leur passage. Phil Jackson a su, une nouvelle fois, tiré le meilleur de son effectif. Le soleil est de retour sur la côte californienne et les Lakers retrouvent les sommets de la ligue. Seulement 15 défaites lors des 82 rencontres de la saison ce qui constituerait, pour certaines franchises, un record encore aujourd’hui. Cette domination d’octobre à mi-avril leur permet d’obtenir la première place de la conférence ouest, mais aussi la première place de la ligue : les angelinos auront l’avantage du terrain jusqu’en finale. Ces 82 matchs de saisons régulières sont le terrain de jeu d’un homme : Shaquille O’Neal. Il va dominer la ligue durant six mois, réduire à néant les raquettes adverses et dunker dans toutes les salles du pays. Le pivot atteint son meilleur niveau et personne ne peut le contester. La moindre espace que ses adversaires lui laissent est transformé en points, et même lorsque les défenseurs lui bloquent le chemin du panier, il se crée le chemin seul grâce à son physique impressionnant. Shaq conclue sa saison chef-d’œuvre avec 29,7 points, 13,6 rebonds et 3 contres par match, le tout en ne manquant que trois rencontres. Le trophée de MVP lui revient logiquement et seul un journaliste lui préférant Allen Iverson l’empêche de devenir le premier MVP unanime de l’histoire de la NBA. Impressionnant.  

Road to the Finals

  Les Kings de Sacramento attendent les Los Angeles Lakers au premier tour des play-off. Au vu de la forme de l’équipe et de l’ultra domination du Shaq, ce tour devrait être une formalité. Les hommes de Phil Jackson ont rapidement mené 2-0 dans cette série les opposant à une équipe joueuse au jeu agréable à regarder. Cependant, saison et play-off sont deux parties bien distinctes. Dominer outrageusement le premier tronçon n’offre aucune garantie pour la suite de la compétition. Les Lakers voient Sacramento remporter les deux matchs suivants et s’offrir une finale au Staples Center. Perdre serait synonyme d’élimination. Conscients de l’importance de la situation, les angelinos terrassent leurs adversaires par prêt de 30 points d’écart grâce à 32 points, 18 rebonds et 3 contres de leur MVP. Place aux demi-finales désormais.  

Shaquille O'Neal au duel avec Chris Webber

Les Suns de Phoenix se dressent devant eux. Malheureusement pour ces derniers, ils offrent une résistance de bien moins bonne qualité que leurs concurrents de Sacramento. O’Neal va faire régner sa loi en scorant 38 points de moyenne sur les trois premiers matchs. C’est grâce à une défense organisée que Los Angeles conclue cette série 87 à 65, un score qui semble lunaire aujourd’hui, avec un Kobe meilleur marqueur de l’équipe.   Les finales de Conférence les opposent aux fameux Jail Blazers de Portland. Cette période contrastée de la franchise actuellement emmenée par Damian Lillard, où les joueurs avaient la fâcheuse habitude de passer leurs après-midi en garde-à-vue ou au tribunal. Malgré les multiples déboires avec la justice, l’équipe réussit à passer les deux premiers tours pour défier Shaq, Kobe et consorts. Le première affrontement de la série est un bijou, une masterclass envoyée par Shaquille O’Neal : 41 points, 11 rebonds, 7 passes et 5 contres. Mais le plus impressionnant est ailleurs. Le MVP n’a manqué qu’une seule minute de cette rencontre et les Blazers ont dû se coltiner le meilleur joueur de la planète durant 47 minutes, monumental. Les matchs suivants voient les Lakers prendre les devants grâce à leur effectif : Kobe score plus de 20 points, Glen Rice enchaine les tirs longue distance et Ron Harper se montre clutch. Résultat, 3-1 et une place en finale qui leur tend inéluctablement les bras. Sauf qu’encore une fois, les hommes de Phil Jackson vont trébucher près du but, comme lors de la confrontation face à Sacramento. Portland va revenir de nul part et gagner les deux matchs suivants. Pippen, Sabonis et Wallace réussissent à renverser la vapeur pour s’offrir un match 7 ultra décisif au sein de l’arène des Lakers, le Staples Center.   Le constat est simple : se faire éliminer alors que l’on mène 3-1, alors que l’on est l’une des deux plus grandes franchises de tous les temps, alors que l’on compte dans ses rangs l’un des joueurs le plus dominant de l’histoire est inconcevable. Les angelinos doivent plier le match et filer en finale afin d’aller chercher le titre attendu depuis douze ans. La première mi-temps de la rencontre est plutôt serrée. Les Blazers s’appliquent à freiner Shaq et y parviennent bien. Le pivot californien passe à côté de sa rencontre et sa faible influence permet à Portland de prendre treize points d’avance à la fin du troisième quart temps. L’écart est conséquent, surtout au vue de la physionomie du quart temps précédent où les joueurs de l’Oregon ont ralenti le jeu afin de faire douter leurs adversaires. Malgré le soutien du public, les californiens sont dos au mur.  

Kobe Bryant feinte le shoot pour la passe à son coéquipier Shaquille O'Neal

Refusant de rentrer chez lui après avoir mené 3-1, le jeune Kobe Bryant va prendre les choses en main dans cet ultime quart temps. Il termine le match avec 25 points, 11 rebonds et 7 passes. Et c’est l’une de ses 7 passes qui va rendre cette rencontre mythique et permettre à sa franchise d’atteindre les finales. Après avoir réussi un retour express, le match devient pesant. Très pesant. Chaque possession, chaque faute peut rapprocher une ville du gouffre et l’autre de la gloire. Alors qu’il reste cinquante secondes au compteur, Los Angeles a l’occasion de plier le match. Kobe Bryant remonte la balle en sachant que si son équipe score sur cette possession, Los Angeles est en finale. Suite à un cross dévastateur sur Scottie Pippen, un des meilleurs défenseurs de l’époque, il pénètre et délivre une passe aérienne pour O’Neal qui attrape le ballon à une main et dunke. Cet alley-oop décisif entre dans la légende, de même que l’attitude du MVP et sa réaction si particulière comme le montre la photo ci-dessus. Suite à une série au suspens insoutenable, les Lakers de Kobe et Shaq atteignent les finales.  

L’avènement d’une dynastie

  Cette fois-ci, hors de question de jouer avec le feu pour les hommes de Phil Jackson. Il faut remporter quatre matchs sans fioritures et ramener enfin le titre à la maison. Les Finals 2000 voient s’affronter les Lakers au Pacers d’Indiana emmené par Reggie Miller et coaché par l’un des plus grand rival de Los Angeles, Larry Bird. Malgré leur campagne de play-off en dents de scie, les californiens partent favoris. En effet, il manque certainement un grand joueur au côté du meilleur shooteur de l’époque, un immense défenseur capable de stopper Shaquille O’Neal par exemple. La série est un carnage. Le MVP atteint un niveau presque jamais vu auparavant et prouve qu’il avait encore une marge de progression vis-à-vis de sa saison régulière. Les chiffres sont saisissants : 38 points et 16,7 rebonds de moyenne sur les six matchs. Aucune trace d’un match où il plante moins de 33 points. Les habitants d’Indianapolis font encore des cauchemars de ces rencontres datant du début du millénaire. A l’heure actuel, la performance du pivot est considérée comme l’une voire la plus grande qu’un joueur ait montré en finale NBA, rien que ça. Quant à Kobe, il manque deux matchs pour cause de blessure et se montre irrégulier. A seulement 21 ans, il glane tout de même son premier titre après que son équipe ait remporté la série 4 à 2.

Kobe Bryant fête le titre avec Shaquille O'Neal et la légende Magic Johnson

  Ce titre est le premier d’une longue série. Les Lakers de Jackson, Bryant et O’Neal vont marquer l’histoire à bien des reprises et établir une dynastie au sein de la grande ligue. La saison 2000 marquera les esprits comme étant le début de celle-ci et de la légende du regretté Kobe.